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mardi 1 juillet 2008

France : Présidence de l’Union N°238 - 1ere année

La présentation faite par Nicolas Sarkozy de la présidence française de l’Union européenne pendant les six mois à venir laisse à penser que notre pays prend la direction de 27 pays. Non, la France représentera tous les Etats membres et s’exprimera en leur nom : l’Union européenne est une collégialité.
Les impatiences élyséennes à débuter cette présidence est atypique à la fois en France et en Europe : aucun chef d’Etat ou de gouvernement ne donnait jusqu’à présent une si grande importance. Nicolas Sarkozy essaierait-il d’appliquer la même méthode que celle qui lui a permis de devenir Président de la République aux Etats membres de l’Union au risque de froisser, d’agacer ? Ils ne sont pas des électeurs.
Que peut donc un président de l’Union ? Pas grand-chose. Il accompagne toute la politique de l’Union. Il oriente tel ou tel dossier et il peut, s’il a une grande crédibilité, peser sur tel ou tel point. Mais, reconnaissons qu’une présidence d’Union stricto sensu ne bouleverse pas la donne.
Evidemment lorsque Nicolas Sarkozy s’exprimait, hier soir sur FR3, et en reprenant un discours quasi chiraquien, il tâchait de se rapprocher des Français en faisant miroiter un mieux-être.
Sur le plan institutionnel, le 1er jour de cette présidence commence par la non ratification du traité de Lisbonne par la Pologne et la confirmation depuis la République Tchèque de sa position négative. Ainsi, constitutionnellement, l’Union européenne se trouvera sous les articles du traité de Nice à moins que, d’ici là, Nicolas Sarkozy, artisan principal du traité de Lisbonne, n’échafaude une combinaison dont il avait le secret quand il était avocat pour les groupes immobiliers. Autant dire que nous démarrons avec un sacré boulet. Pour l’heure, à défaut de faire venir Barroso à l’UMP ce samedi, on ne voit pas trop ce qui pourrait très rapidement placer sur des rails constitutionnels solides l’Union européenne.
Sur le plan social, la commission européenne a décidé, voilà presque un mois, de faire passer la durée légale hebdomadaire de travail de 48 heures à 65 heures. Au même moment, rappelons-le, le gouvernement Fillon démantelait les 35 heures, plaide pour la libéralisation du travail sous le slogan « travailler plus pour gagner plus ». Or, la baisse du pouvoir d’achat ainsi que les incertitudes boursières - de nombreux Français ayant placé un capital pour grandir leur retraite ou avoir une réserve en cas de coup dur- plombent littéralement le moral national et européen. Toute cette pression sur les salariés et, maintenant, sur les retraités rend urgent une politique sociale européenne. Or, la logique de la Commission la conduit vers une protection sociale ad minima. Comment faire ? C’est, certainement, le moment de regretter que les acteurs de la construction européenne ne voulurent jamais concevoir de services publics à l’échelle continentale. C’est pourtant là que se trouvait une capacité fédérative importante et si ces services existaient la problématique sociale se poserait autrement et avec des solutions plus attractives.
Sur le plan économique et fiscal, en ressortant le dossier de la réduction de la TVA pour les restaurateurs français, le Président renouvelle la démarche chiraquienne pour mieux se heurter, semble-t-il, à un niet allemand. La proposition française ne brille pas par son imagination. Ne lui faudrait-il pas plutôt travailler à l’harmonisation fiscale des 27 états ?
Sur le plan militaire, le projet français d’établissement d’une défense commune est un dossier sur lequel compte énormément Nicolas Sarkozy. Il a donné des gages en remettant la France dans l’OTAN et par l’envoi de troupes pour une bataille perdue en Afghanistan. Cela suffira-t-il pour motiver les Européens ?L’ambition de Nicolas Sarkozy d’occuper toute la place en Europe et en particulier auprès des nouveaux entrants suppose une puissance économique et une santé financière indéniables est-ce le cas ? Cette envie devrait conduire l’actuel chef de l’Etat à recréer le tandem avec Berlin. Or, il n’aime ni ne comprend l’Allemagne. De son côté la chancelière, Angela Merkel, n’a pas une grande estime pour lui d’une part et d’autre part, son pays dispose d’une influence considérable sur les nouveaux états de l’Union. Peut-on croire que l’Union ira d’un bon pas sans un duo franco-allemand ? Misez sur l’alliance anglaise est une erreur de la part de l’Elysée.
Au fond comment la présidence française de l’Union pourra-t-elle occuper les esprits si ce n’est en donnant de l’importance à la mise en scène ? L’arrivée du designer Philippe Stark qualifiée par Bernard Kouchner de «
directeur artistique de l’Union européenne » fournit une clef sur la manière dont on compte nous illusionner. On sait que prés de deux cents millions d’euros seront consacrés aux six mois de la présidence française : le spectacle aura son importance. Nicolas Sarkozy sait tout ce qu’il ne peut pas faire et conçoit sa com’ pour que l’on soit persuadé du contraire.
La France n’est pas plus l’homme malade de l’Europe que l’Italie, c’est tout le continent qui est incapable de se placer à la hauteur des bouleversements mondiaux, de réfléchir en toute indépendance sans claquer des dents si Washington fronce le sourcil démocrate ou républicain, de savoir lire, enfin, une carte géographique.
Le travail de Nicolas Sarkozy serait de redonner la parole aux peuples de l’Union via les consultations nationales. S’il le faisait, sa présidence revêtirait une importance. Tant que les peuples se sentiront exclus ou pire encore que leur parole souveraine sera bafouée, l’Union boitera.
La France pèse, les dirigeants européens le savent. En 2003, la France –pas davantage l’Allemagne - n’est pas sortie du jeu européen au moment de l’affaire irakienne, elle a évité le pire. Il manque à l’Union européenne des hommes politiques visionnaires et courageux.


©Jean Vinatier 2008

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