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mercredi 7 mai 2008

Medvedev/Poutine une dyarchie russe ? N°199 - 1ere année

1991, en plein désordre et deux années avant qu’un quarteron de soviétiques tentent un putsch, Boris Eltsine devenait le premier Président de la Fédération de Russie. 2008, l’investiture du troisième Président, Dmitri Medvedev (né en 1966) se déroule dans le plus grand calme parmi les ors et les encens. Vladimir Poutine de Président deviendra Premier ministre tout en restant à la tête de la Russie Unie (son parti).
Les titres surprennent, Dmitri Medvedev est dit « le chef du Kremlin ». Appellation étrange, ironique qui souligne, cependant, la difficile compréhension par les Européens de la nouvelle page de l’histoire russe. Cette dyarchie qui se mettrait en place attise, en fait, la crainte de la poursuite de la politique menée pendant les années 2000. Qu’observe-t-on? Les droits de l’Homme sont limités, la presse est muselée, la démocratie réduite à la portion congrue, l’armée russe menace la Georgie…et ainsi de suite. Sans avoir à se livrer à une contre-attaque en règle ou non contre cela, le reproche principal (et c’est bizarre) fait à Moscou est de grandir sur tous les autres plans (économique, social, financier, militaire, environnemental) sans lesquels l’actuel Président Medvedev apparaîtrait insupportable…aux yeux de son peuple.
Pourquoi une dyarchie ? Vladimir Poutine n’a pas enfreint la constitution en tentant le coup de force pour pouvoir effectuer un troisième mandat, interdit en l’état. La dyarchie se ferait dans un cadre institutionnel (critiquable bien sûr) avec l’assentiment général.
La principale flèche décochée contre cette dyarchie, qualifiée de théâtrale, par de l’idée que Vladimir Poutine gardant le pouvoir et la tête de Russie Unie, il n’avait qu’à choisir le plus pâlot des siens pour donner le change. Or, le jeune Président n’est pas un idiot, pas davantage ne sort-il du néant. Il était encore ces derniers jours président du directoire de Gazprom qui ambitionne de devenir le premier fournisseur mondial de gaz. Imagine-t-on un simplet à sa tête ? Certainement pas.
Poutine nie toute dyarchie : « Je ne peux convenir que nous assistons à la naissance d'une dyarchie, modèle dont les conséquences ont été tristes dans l'histoire russe ». Medvedev secontente d’une phrase :« La Russie est une république présidentielle avec un pouvoir exécutif fort » ¹
Le mot, en tout cas, gêne les deux ; historiquement la dyarchie est liée à une période d’instabilité. Elle est mentionnée en 1549 lorsque Ivan IV convoque un zmski sobor (congrès de la Terre russe) qui rappelle le principe des états-généraux d’avant 1789. Par la suite les différents zmiski sobor éliront les tsars (Boris Godounov en 1598), puis pendant le Temps des troubles (1605-1611), Vassili IV Chouïski et Ladislas IV de Pologne et enfin, en 1613, Michel III Romanov. Pierre Ier ne les rassemblera plus. Il a le pouvoir entre ses mains.
Jean-Pierre Raviot, maître de conférence à Sciences-Po, évoquera la dyarchie pour qualifier les deux premières années de présidence de Boris Eltsine (1991-1993). Là encore le mot met l’accent sur la débilité du pouvoir politique. On comprend dés lors que Vladimir Poutine et Dmitri Medvedev ne tiennent absolument pas à apparaître aux yeux des Russes comme des hommes indécis, craintifs. Le message est clair, il n’y a pas de dyarchie parce que la mécanique de pouvoir est bien réglée ; on ajouterait entre eux.
L’Occident retient ce mot avec une connotation négative. Il indique, de cette façon, que la Russie est encore à une certaine distance de la démocratie telle qu’il la conçoit et voudrait l’avoir dans le monde.
Si l’on met de côté les disputes « lexico-historiques », on peut écrire que le système de pouvoir mit en place à la fin de l’URSS en décembre 1991 tend progressivement à assurer la pérennité d’une famille politique associant les ex du KGB et les oligarques devenus des milliardaires ; tous les opposants à cette ambition ont été progressivement écartés. Il n’y a plus qu’un seul pouvoir en Russie. Stricto sensu, la dyarchie n’existe pas.
Cette conclusion n’interdit absolument pas qu’une compétition débute entre Poutine et Medvedev quoique tous les deux soient liés par un « pacte »². On le sait le pouvoir a une vertu puissante à transformer les hommes, à bouleverser les plus précises des combinaisons. Rappelons-nous l’Angleterre du temps de la guerre des Deux Roses : Richard Neville, comte de Warwick (1428-1471) surnommé le faiseur de rois parce qu’il jouait sur les rivalités de deux maisons concurrentes n’en finit pas moins en disgrâce³.
Un nouveau tsarisme commence.

©Jean Vinatier 2008

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Notes
:

1-
http://fr.rian.ru/russia/20080325/102125553.html
2- Tout comme il y a eu un pacte entre Boris Eltsine et Vladimir Poutine
3- Entre les maisons de Lancastre et de York représentées par une rose.

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