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vendredi 28 mars 2008

Le FMI, un vieux fonds ? N°170 - 1ere année

Dominique Strauss-Khan a-t-il été flingué en plein vol dans sa volonté de réforme du FMI qu’il préside depuis l’automne 2007 ?
Que proposait-il ? Rien de bien révolutionnaire : modifier le système de vote pour réussir un transfert de vote de 1,6% en faveur des pays du Sud qui verraient leur pourcentage de voix passé à 42,6% contre 40,5% actuellement. D’après
Libération, une bonne dizaine de think tanks engagent l’ensemble des 185 membres du FMI à ne pas approuver cette mesure : « Selon eux, cette mesure est «loin d’apporter une réponse aux défis auxquels le FMI est confronté pour devenir une institution vraiment mondiale».¹
Institution mondiale issue (1947) comme la banque mondiale (alors BIRD) des accords de Bretton Woods signés en 1944 dans le New Hampshire, le FMI se voyait en charge de bien des tâches : promouvoir la coopération monétaire internationale, garantir la stabilité financière, contribuer à un niveau élevé de l’emploi, faire reculer la pauvreté. Il devait assumer, la stabilité du système monétaire international et gérer les crises monétaires et internationales. Son principal moyen d’action est de fournir des crédits à des pays qui pâtissent de situations internes difficiles et donc perturbent le système financier et le flux d’échanges du commerce mondial. Il impose une politique d’austérité monétaire et de rigueur budgétaire dont l’Argentine a fait les frais et avant, l’Asie en 1997.
En 2008, le FMI est-il le médecin malade de notre temps² ? Correspond-il aux défis du monde nouveau ?
Les accords signés à Bretton Woods –mais quasiment rédigés à Atlantic City - sont le fait de deux figures célèbres, le chef de la délégation américaine, Harry Dexter White (par ailleurs espion à la solde de l’URSS) et du côté anglais, John Maynard Keynes, devenu Lord Tilton en 1942.
Deux points de vue. Pour Keynes, l’économie est subordonnée au politique. Il proposait la construction d'un nouvel ordre monétaire international, destiné à favoriser le plein-emploi, la croissance, et à préparer un monde sans guerre. Pour ce faire, il suggérait la création d’une monnaie supranationale baptisée Bancor. Cette monnaie, purement fiduciaire, serait détenue par les différentes banques centrales des pays. Sa gestion échapperait donc au contrôle d’un pays en particulier. Cette idée plaisait, évidemment aux européens affaiblis par la guerre et dont le pouvoir économique et politique était en déclin ; ils éviteraient, de la sorte, d’être à la merci du pouvoir décisionnel américain. Enfin, chaque monnaie nationale se verrait attribuée une parité fixe avec le Bancor³. Keynes échoua, le rapport de force ne lui était pas favorable.
Pour le gouvernement américain, il fallait coûte que coûte empêcher que ne se reproduisent les problèmes liés à l’instabilité monétaire(inflation et déflation) observée après la première guerre mondiale : c’est-à-dire éviter les dévaluations en chaîne vécues lors de la crise des années trente qui ont conduit à la forte contraction du commerce international ; d’où sa préférence pour la désignation d’une monnaie (le dollar) pour le commerce international et de la gestion des taux de change. Au FMI d’être le fonds de stabilisation pour financer les déséquilibres temporaires des différentes balances des paiements des états membres. C'est une sorte de « banque centrale des banques centrales et trésors publics ».
Les accords de Bretton Woods perdirent de leur force dans les années 1970 : Richard Nixon décida de suspendre la convertibilité en or du dollar (15 août 1971) et permit d'élargir les marges de fluctuations pour les monnaies nationales. Avec l’abandon de facto du système de Bretton Woods au profit de taux de change flottants, officialisé par les accords de la Jamaïque en 1976 débuta une nouvelle période pour le FMI. Il aida, principalement, les PVD ( pays en voie de développement).
La crise financière triplée en crises bancaire et économique avec le spectre d’une récession que l’on feint de limiter aux Etats-Unis, met le nouveau patron du FMI, Dominique Strauss-Khan devant un défi et une marge de manœuvre étroite. Les États-Unis sont le contributeur principal et possèdent ainsi 16,79 % des droits de vote ; l'Union européenne possède 32,1 % des droits de vote. Washington décourage toute réforme qui remettrait en cause la suprématie du dollar et Bruxelles se gorge comme Gordon Brown « d’Europe mondiale »
S’il faut rééquilibrer les votes, la question d’une monnaie supranationale ne devrait plus être éludée. D’une part des puissances comme la Chine, l’Inde, le Brésil, le Mexique piaffent et, l’entrée sur la scène internationale des fonds souverains, d’autre part, pourraient établir un rapport de force original.
Le FMI court le risque comme responsable en dernier ressort de la liquidité du système financier international et comme acteur décisif pour éviter le blocage des échanges et la contagion à tout le système (risque systémique) de problèmes momentanés de solvabilité d'un pays ou d'une banque centrale donnée de n’être plus qu’une sous-structure du dollar.
En 1944 Keynes notait sur son ton sarcastique : « Les Américains n'ont aucune idée sur la manière de placer ces institutions dans une perspective d'intérêt international, et leurs idées sont mauvaises dans presque toutes les directions. Ils sont pourtant complètement déterminés à imposer leurs convictions sans considération pour le reste d'entre nous. [...] Ils croient posséder le droit de donner le ton à propos de pratiquement tous les points abordés. S'ils connaissaient la musique, passe encore, malheureusement ils ne la connaissent pas. »4
Réfléchissons !

©Jean Vinatier 2008

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Notes :

1-
http://www.liberation.fr/actualite/economie_terre/318042.FR.php

2-
http://www.monde-diplomatique.fr/carnet/2007-09-30-Le-FMI-medecin-malade

3- l’économiste, Jacques Riboud (1908-2001) fondateur du Centre Jouffroy pour la réflexion monétaire a repris ce nom dans Le nouveau bancor, Paris, Centre Jouffroy, 1999 & 2005

4-Extrait des The Collected Writings de Keynes, traduits par Charles-Henri Hession, professeur au Brooklyn College, NY en 1985. (30 vol., Londres, McMillan, 1971-1989)

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